Elévation du plafond pour le CPF, possibilité d’entrée en apprentissage sans limite d’âge, contrat de rééducation professionnelle, etc. : les PSH (Personnes en Situation de Handicap) bénéficient dans les textes d’une aide importante à la formation professionnelle.

Pourtant, l’accès à la formation n’est pas seulement une question de droits ou de moyens financiers. Ce n’est pas non plus la seule question des normes PMR (ascenseur, portes élargies, etc.) qui, heureusement, sont aujourd’hui monnaie courante dans les centres de formation. C’est avant tout l’adéquation des ressources pédagogiques avec le handicap rencontré qui conditionne en pratique l’accessibilité d’un parcours de formation.

Cette adéquation peut sembler d’autant plus difficile qu’il existe une multitude de handicaps différents, requérant des réponses et des aménagements spécifiques, et que deux personnes souffrant de la même pathologie peuvent parfois nécessiter des accompagnements distincts en fonction de leurs personnalités et aptitudes respectives.

Mais, en réalité, le problème principal réside dans l’inaptitude du formateur moyen à proposer une session inclusive. Et, en effet, il n’est pas facile de veiller à la fois l’accueil, l’information, l’apprentissage effectif et l’évaluation d’un PSH. Il faut pour cela utiliser les bons outils et savoir communiquer de manière suffisamment juste pour être capable de différencier sans isoler ou exclure.

Que les formateurs se rassurent, toutefois, les enseignants de l’Education Nationale partagent les mêmes difficultés et se sentent généralement tout aussi démunis. Mais, à la fin, il faut bien que les uns et les autres se relèvent les manches pour concrétiser les vœux du législateur et fonder une société plus respectueuse et plus solidaire !

  

Quelques notions générales

Avant toute chose et avec l’accord de l’intéressé, il peut être bon de sensibiliser les autres participants au handicap de leur camarade stagiaire afin d’expliquer et justifier à la fois les mesures prises, tout en favorisant la compréhension empathique, le respect et même, de la part du groupe, une certaine forme de tutorat spontané.

Quel que soit son handicap, le stagiaire devra mobiliser un surcroît d’énergie pour suivre votre formation. Il faudra donc veiller d’emblée à sa concentration et sa fatigabilité. Concrètement, cela se traduira par une place à proximité immédiate du formateur avec un horizon visuel réduit, un rythme ralenti et des pauses fréquentes. Il faudra également essayer de limiter l’information à l’essentiel pour ne pas surcharger son système cognitif par des sollicitations trop nombreuses ou trop complexes. Ne pas polluer non plus l’environnement visuel de l’apprenant en couvrant de notes votre tableau ou votre paperboard, ou bien en utilisant des diapos trop chargées. Un langage simple, un code couleur clair et un modèle de présentation identique tout au long de la session (par exemple : écrire au centre du tableau) seront les bienvenus.

Comme, en outre, il ne s’agit pas seulement de transmettre des informations mais bien d’accompagner un stagiaire vers un objectif pédagogique sanctionné par une évaluation, il vous faudra valider que les notions clés et les surtout les consignes d’évaluation sont bien comprises en l’invitant régulièrement à répéter ou reformuler. Il ne s’agit évidemment pas d’infantiliser le PSH mais toujours de tenir compte de la fatigue mentale imposée par son handicap. Au contraire, pour éviter de le dévaloriser, vous aurez soin de le soutenir dans ses progrès par des encouragements afin d’augmenter sa motivation et sa confiance en lui. Vous saisirez ainsi toutes les occasions de valoriser ses aptitudes particulières (comme la remarquable mémoire dont font généralement preuve les déficients visuels).

Pour éviter qu’il ne s’isole, il vous faudra le solliciter et l’interroger fréquemment sans avoir l’air de stigmatiser.

Enfin, quel que soit son handicap, le stagiaire aura besoin qu’il lui soit accordé davantage de temps dans le cadre de son évaluation (qu’il s’agisse des prérequis de début de formation ou de l’évaluation finale).

 

L’accompagnement des déficients visuels

Il y a une différence entre déficience visuelle et cécité. Dans le premier cas, il existe un résidu visuel dont il est de votre devoir de formateur de tirer le meilleur parti possible. Comment ? En suivant ces quelques tips :

  • Mettre à disposition d’un ordinateur que le déficient visuel (DV) peut facilement régler à sa convenance (type et taille de police, couleurs, etc.). Les documents doivent naturellement lui être transmis dans un format qui permette ces modifications d’affichage.
  • Autoriser et même favoriser l’emploi d’un dictaphone.
  • En cas de remise d’un support imprimé : augmenter la taille de la police ; renforcer les contrastes de couleur ; éviter les trop grands formats (A3 par exemple) dont l’exploration visuelle est encore plus complexe pour un DV ; ne jamais utiliser de document flou ; restreindre et simplifier l’information écrite au maximum.
  • Limiter les déplacements (ne pas prévoir d’activités pédagogiques nécessitant d’aller et venir dans la salle).
  • Favoriser les supports audio et l’oralité, ainsi que les supports tactiles (dans le cas de jeux pédagogiques par exemple).
  • Utiliser des visuels « visibles ». Pour cela, vous pouvez puiser dans la banque d’images gratuite de l’INSHEA en vous rendant sur le lien suivant : https://inshea.fr/ressource/liste-des-fiches-sdadv-multi-filtre. Elle offre de nombreuses illustrations sur des thèmes très variés qui présentent d’emblée la palette de couleurs et les contrastes requis par les déficients visuels.
  • Inciter le DV à se rapprocher de la source d’information (par exemple le document word qui se trouve sur son écran), car il est rare qu’il le fasse spontanément.
  • Décrire systématiquement des émotions faciales des différents participants lors des échanges et interactions afin de faciliter son intégration dans le groupe d’apprenants.
  • Evaluer autant que possible le DV à l’oral.

 

L’accompagnement des déficients auditifs

Les déficients auditifs nécessitent également un accompagnement particulier. Voici quelques indications concrètes pour vous aider dans votre mission pédagogique :

  • Transmettre les contenus au moins une semaine à l’avance pour permettre au stagiaire de pouvoir concentrer davantage son attention sur les interactions et éviter la double tâche (gestion simultanée de l’information et des interactions ; extrêmement énergivore).
  • Sous-titrer les vidéos ou en remettre à l’avance la transcription.
  • Veiller à vous placer bien en face du PSH lorsque vous vous adressez au groupe, et à pointer du doigt les participants au fur et à mesure de leurs prises de parole (ou utiliser un bâton de parole) afin de faciliter la bonne compréhension de l’échange.
  • Employer un langage épuré et correctement articulé. Des phrases courtes, sans métaphore. Privilégier les mots simples (le langage courant) et expliquer les mots compliqués. Développer systématiquement les acronymes (exemple : CPF/Compte Personnel de Formation). Employer plutôt des phrases actives (où le sujet fait l’action) que passives (où le sujet subit l’action), exemple : utiliser plutôt « on a installé les tables en U » plutôt que « les tables ont été installées en U ».
  • Ne pas mettre le paquet sur le visuel. En effet, les déficients auditifs compensent énormément par la vue et le but n’est pas de leur occasionner un surcroît de fatigue visuelle.
  • Faire traduire en LSF ou LPC si possible et/ou si nécessaire (en fonction du budget ainsi que du soutien logistique accordé par l’entreprise ou le financeur de la formation).
  • Evaluer le déficient auditif à l’écrit ; la surdité s’accompagnant le plus souvent de difficultés d’élocution et l’oral impliquant de surcroît la gestion des interactions, la lecture labiale, etc. qui risquent de complexifier inutilement l’examen.

 

L’accompagnement des personnes atteintes de troubles du langage

Le saviez-vous ? 8% des adultes souffriraient de TSLA (troubles spécifiques du langage, autrement appelés troubles de l'apprentissage). On parle également de « DYS » pour qualifier cette famille de handicaps aux mille visages : dyslexie, dysothographie, dyspraxie, discalculie, troubles de l’attention… 

8%, cela représente une personne sur 12 environ. Selon cette statistique, vous pouvez considérer qu’il y en a presque toujours un dans une session de formation. 

Si ces troubles sont évidemment moins invalidants qu’une déficience visuelle ou auditive, il n’en reste pas moins qu’ils nécessitent de la part du formateur une connaissance des difficultés et des réflexes appropriés, d’autant plus qu’il s’agit de handicaps invisibles au premier abord et quelquefois ignorés des participants eux-mêmes :

  • Présenter des textes qui conviennent également aux dyslexiques. Cela signifie utiliser une police bâton type Arial, des textes aérés (interligne 1,5 par exemple), non justifiés et un contraste de couleurs d’au moins 70%.
  • Permettre aux participants qui présenteraient des analogies comportementales avec les TDA (inattention, hyperactivité) de se déplacer fréquemment dans la salle (par exemple pour aller chercher une carafe d’eau, inscrire une notion sur le paperboard, ramasser les post-it des autres stagiaires, etc.).
  • Au moment de former des sous-groupes, privilégier les trinômes (un participant qui prend les notes, un autre qui transcrit et le troisième qui restitue à l’oral). De cette façon, chacun prendra naturellement le poste qui le met le plus en valeur en appliquant la stratégie d’évitement plus ou moins consciente que les adultes souffrant de TSLA ont appris à mettre en œuvre depuis l’enfance.
  • Proposer des tête-à-tête informels avec les participants qui ne prennent pas volontiers part aux échanges. Quelquefois, la « timidité » est en effet motivée par une difficulté plus profonde… Ceux-là auront besoin d’empathie et d’écoute bienveillante.
  • Privilégier les QCM et les tests oraux en phase d’évaluation, globalement plus abordables aux personnes atteintes de TSLA. 

 

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